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Le 14/01/2020 à 14h

32 grands entretiens avec des figures de la ville de demain

Voici une sélection de jeux de questions-réponses réalisés au fil de l'année 2019 - à l'écrit et à la radio. Ils présentent les stratégies des territoires, les réflexions sur les tendances de l'aménagement et le positionnement des différents acteurs.

32 grands entretiens avec des figures de la ville de demain

Comment imaginer la ville de demain ?

"Beaucoup de politiques d'aménagement sont obsolètes par rapport au bon sens et aux besoins qu'on a aujourd'hui pour avoir un aménagement ou plutôt un 'ménagement' du territoire imposé par la transition écologique", selon la présidente de l'Ordre des architectes d'Ile-de-France, Christine Leconte. Elle estime que les villes "peuvent retrouver l'usage qu'on est allé chercher dans du pavillonnaire", et évoque la nécessité que l'Anru favorise davantage la réhabilitation plutôt que la démolition-reconstruction ou encore que les promoteurs se saisissent du déjà-là, en étant moins centrés sur la construction neuve.
"Le trottoir est l’actif urbain le plus stratégique pour les villes", estime Isabelle Baraud-Serfaty, consultante en économie urbaine et fondatrice d’Ibicity.
Alors que les réflexions autour du réemploi se multiplient, Laurent Mogno, PDG d'ECT, le premier opérateur du recyclage des terres en Ile-de-France, détaille comment "les terres excavées du Grand Paris Express ne sont qu'une partie des volumes annuels". "Nous sommes un acteur de volume", résume-t-il sobrement, avant de préciser : "En deux ans et demi, nous retrouvons un emploi à l'équivalent de toutes les terres que produira le Grand Paris Express en douze ans."

Le changement climatique transforme (enfin) les pratiques de l'aménagement

Le directeur général adjoint de L'Institut Paris Région (ex-IAU IDF), Sébastien Chambe, réfléchit sur la manière de changer le logiciel des agences d'urbanisme pour qu'elles arrivent à guider les collectivités à la fois vers le zéro artificialisation nette et le zéro émission nette de CO2 et dans des relations renouvelées avec les territoires voisins.
"Il est important que l’adaptation au changement climatique prenne toute sa place dans les agendas des professionnels du cadre bâti", explique Anne-Sophie Perrissin-Fabert, la directrice de l'association reconnue d'utilité publique l'Alliance HQE-GBC. "Nous nous sommes fixés pour objectif de rendre possible une analyse du cycle de vie à l’échelle du quartier", notamment grâce à la certification HQE Aménagement.
Jean-Pierre Frémont, le directeur d'EDF Collectivités, défend que le changement d'approche doit être radical dans les domaines du bâtiment et des transports. "La baisse des émissions de carbone est la boussole qui nous indique la bonne direction" et les solutions sortiront de la mise en commun entre acteurs : "Nous ne nous en sortirons pas en restant dans nos couloirs respectifs."
Ce dernier intervenait dans le cadre des échanges qui ont précédé l'édition 2019 des Entretiens du Cadre de Ville, échanges préliminaires qu'avait lancés Daniela Sanna, Cheffe du service des organisations urbaines à l'Ademe.
Jean-Baptiste Butlen, directeur de l’aménagement durable au sein de la DGALN/DHUP, parcourt le panorama des modes d’intervention de l’Etat, et présente ses attentes nouvelles : "Trois enjeux sont prioritaires pour les politiques d’aménagement urbain : la résilience climatique, la sobriété dans la consommation des ressources, ainsi que l’urbanisme concerté, de la ville du quotidien." Après dix ans d’expérimentation, le temps est à la généralisation en s'appuyant sur la diversité des acteurs de la ville et leurs réseaux défend-il.
Economie des ressources, recyclage urbain, attention portée aux usages : pour Benoît Quignon, directeur général de SNCF Immobilier, nous n'avons plus le choix : "Le métier qu'il faut apprendre, c'est la transformation de l'existant". Et Stéphane Keïta, p-dg de la Scet, de renchérir : "Nous entrons dans un nouveau cycle de l'aménagement".
"Il faut demeurer vigilant à l'égard des fausses bonnes idées et des actuelles limites", met en garde Joël Baud-Grasset, président de la FNCAUE. "Qu’il s’agisse d’agriculture urbaine, d’adaptation aux changements climatiques, de transition écologique au sens large, l’un des maîtres mots sera la sobriété". D'autant qu'avec la pression foncière, "les difficultés rencontrées par certains élus locaux pour satisfaire les besoins en logements contraindront de fait les surfaces dédiées à l’agriculture".

Vu des élus et des fonctionnaires locaux...

• Ile-de-France
Stéphane Troussel présente l'ambition de la consultation internationale sur la vision du département de Seine-Saint-Denis à l’horizon 2030. Il faut 'donner un sens aux mutations urbaines' à l'œuvre sur le territoire, et donner à voir quelles seront l'identité et les manières de vivre sur ce territoire à cette échéance.
Mais comment ce territoire qui fut si longtemps exclusivement industriel et populaire absorbe-t-il le 'choc' de la diversification par le haut, notamment en accueillant de grands équipements internationaux tels les Jeux olympiques ? Notamment par l'encadrement réglementaire. 'Le PLUi de Plaine Commune va encadrer le Village olympique', explique Gilles Poux, maire de la Courneuve, vice-président de Plaine Commune en charge de ce PLUi. Il détaille les grands enjeux du document d’urbanisme, le premier de nouvelle génération adopté dans le Grand Paris.
Les villes populaires, c'est aussi la rénovation urbaine. Grigny est la ville de tous les dispositifs de rénovation urbaine - PRU puis NPNRU sur la Grande Borne, première Orcod-IN à Grigny 2 - et en même temps une ville qui tente de dessiner un vrai centre-ville pour 'redevenir une ville normale'. Philippe Rio, son maire, défend que 'le droit à la ville prend son sens à Grigny'.
Le maire d'Argenteuil veut 'reconquérir la Seine' - après des années d'études stratégiques sur son avenir. Georges Mothron détaille les grands axes de la stratégie de ses équipes, bien déterminées à mettre Argenteuil sur la carte de chacun, des investisseurs privés aux touristes étrangers.
L'adjoint au maire d'Issy-les-Moulineaux, Philippe Knusmann, revient pour Cadre de Ville sur les quatre opérations majeures de la commune : la ZAC Léon-Blum, Issy Cœur de Ville, la ZAC du Pont-d'Issy et le secteur de la rue Guynemer. 'Nous devons construire 600 logements par an' - 'résultat : il faut s'élever' avec des tours.
L'adjointe en charge de l'urbanisme de Bagneux, Yasmine Boudjenah, expose sa vision : 'Nous ne voulons pas seulement être une ville résidentielle'. La commune aux 40 000 habitants en accueillera d'ici 2030 10 000 personnes de plus, attirées notamment par les deux futures lignes de métro dans le cadre du Grand Paris Express - le prolongement de la ligne 4 et la ligne 15 Sud, interconnectés au sein d'une nouvelle gare -. La commune porte en ce moment de nombreuses opérations d'urbanisme, dont le méga PUP des Mathurins, et entend aussi faire en sorte de faire passer le ratio d'emploi par actif de 0,8 à 1.

• Bretagne
La région a approuvé son Sraddet fin novembre. L'occasion de revenir sur son élaboration avec Laurence Fortin, vice-présidente chargée de l'aménagement territorial - ou l'opportunité de mobiliser pour l'ensemble des acteurs d'un territoire aux ressources finies.
Tifenn Quiguer, vice-présidente de Brest Métropole en charge de l'aménagement, détaille ses ambitions pour 'faire rayonner la Métropole à 180°'. Si ces dernières années, le cœur de Brest a énormément bougé, il reste un défi : lier les différents projets au sein d'un récit de territoire.
Johanna Rolland, présidente de la Métropole et maire de Nantes, entend mener une synthèse entre politique d'attractivité face à la concurrence européenne, et l'attention au lieu de vie et à l'échelle fine de l'urbanisme du quartier et de la rue. 'On est en train de construire la troisième étape de l'histoire urbaine nantaise', un chapitre où la nature en ville et la maîtrise d'usage jouent un rôle important.

• Occitanie
L'adjointe au maire déléguée à l’environnement de Montpellier Métropole, Stéphanie Jannin, revendique de 'fédér[er] une identité locale autour de la question de la transition écologique'. Elle nous présente le bilan des deux premières phases de la démarche Ecocité sur le territoire, ainsi que les détails de la démarche volontariste et partagée en matière d'adaptation d'une agglomération qui a protégé les deux tiers de son territoire pour les vingt prochaines années.

• Nouvelle-Aquitaine
Nicolas Florian, maire de Bordeaux, annonce 'un concours sur les boulevards, un vrai concours d'urbanisme, qui traitera une bande de 500 mètres'. Défenseur d'une modification du PLUi pour imposer du logement abordable, favorable aux économies qui pourront faire baisser les prix du logement, il prône notamment une sobriété de la conception architecturale.

• Hauts de France
Alain Neveü, le délégué interministériel pour le renouveau du bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais, présente les enjeux de sa mission. 'On travaille différemment, dans un esprit de subsidiarité bien pesée' dans un territoire 'sur lequel il n'est pas complètement évident de mener des opérations ambitieuses' et qui pourrait accueillir plusieurs PPA multisites, sur les deux départements.
Luc Davis, président de la Shema, revient sur trente ans d'actions et ses ambitions pour la suite : 'Nous sommes aménageur, opérateur et investisseur immobilier'. Au programme, notamment, un nouvel élargissement de son actionnariat et la création d'une foncière dédiée au portage de locaux commerciaux pour revitaliser les centres-bourgs.
Franck Merelle, qui dirige l'une des agences d'urbanisme des Hauts-de-France, l'Agur, de la région Flandre - Dunkerque, explique sa manière de travailler au développement du territoire : 'Nous voulons être des révélateurs d'opportunités'.

Logement, maires (encore) et archéologie préventive

La maire de Bondy et présidente de l'Amif, Sylvine Thomassin, défend qu'"Il faut que les maires aient une voix beaucoup plus prépondérante", notamment une plus grande place dans la co-élaboration des PLUI. Selon elle, "les villes ne peuvent pas être d'un côté asphyxiées financièrement par l'Etat et de l'autre être asséchées dans leurs compétences par les intercommunalités". Elle regrette aussi le sort actuel du PMHH, qui douche ses espoirs d'un rééquilibrage de logements et notamment sociaux vers l'ouest de la métropole.
Benoist Apparu, le président du directoire d'In'li, la filiale d'Action Logement dédiée au logement intermédiaire, par ailleurs maire de Châlons-en-Champagne et ancien secrétaire d'Etat, présente le nouveau dispositif mis en place avec Linkcity Ile-de-France : de la location-accession intermédiaire, sur le modèle du PSLA dans le logement social. "Nous devons créer un marché de l'accession intermédiaire" : il appelle à "massifier" ce type d'innovations juridiques et financières et défend la nécessité d'une plus grande densité et de logements plus petits en zones tendues, pour répondre à l'impératif de lutte contre le réchauffement climatique.
L'archéologie préventive "permet de redonner de la valeur à un secteur figé", explique Dominique Garcia, le président de l'Inrap. Il défend que si la loi de 2001 a permis aux archéologues et aux aménageurs d'intervenir sur le terrain à des moments différents, facilitant leur travail, leur collaboration pourrait encore être améliorée, en inscrivant davantage le patrimoine dans le projet urbain à venir.

Camille BONAZZI, journaliste à cadredeville.com

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