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Le 01/12/2016 à 16h

Les nouveaux outils de la coopération Etat-Collectivités locales

Dans son rapport remis le 7 septembre 2015 à la Ministre du Logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, Thierry Lajoie, PDG de l'établissement public Grand Paris avait mis en avant la légitimité de l'Etat pour s'impliquer dans la politique du logement, en complément de la décentralisation des compétences d'urbanisme et des politiques de l'habitat. Et il insistait sur le fait que cette implication devait se faire le plus possible sous forme partenariale, via une boîte à outils comprenant entre autre le mécanisme du Groupement d'Intérêt Public mais devant nécessairement être rapidement enrichie.

C'est à la fois chose faite avec la création de la SEMOP d'aménagement et en cours de l'être avec la Société Publique Locale d'Intérêt National.

Les nouveaux outils de la coopération Etat-Collectivités locales

Une forme de Partenariat Public-Privé

A une heure où le tant décrié PPP contractuel prend la forme d'un marché de partenariat dans les nouveaux textes applicables aux marchés publics (ordonnance du 23 juillet 2015 et décret du 25 mars 2016), son volet institutionnel semble avoir le vent en poupe. Apres la création par une loi du 1er juillet 2014 des Sociétés d'Economie Mixte à Opération Unique (SEMOP), la loi NOTRe du 7 août 2015 a elle donne naissance à la Société d'Economie Mixte d'Aménagement à Opération Unique, dite SEMAOP ou SEMOP d'aménagement.

Constituée pour la réalisation d'une opération de construction, de développement du logement ou d'aménagement, elle a vocation à être constituée par l'Etat ou un de ses établissements publics d'aménagement avec une ou plusieurs collectivités territoriales ou un groupement de collectivités territoriales compétent et avec au moins un actionnaire opérateur économique choisi après une procédure de mise en concurrence. Contrairement aux SEMOP de 2104, la SEMOP d'aménagement est donc composée d'au moins trois actionnaires.

Les personnes publiques doivent détenir entre 34 et 85% du capital de la structure, ce qui fait que, à l'instar des SEMOP classiques, une SEMOP d'aménagement peut avoir un capital majoritairement privé. Le minimum de 34% du capital peut se répartir entre ces personnes publiques. Et donc, en cas de désaccord entre elles, la minorité de blocage pourrait ne pas être acquise.

Parmi les avantages de cet outil, on peut en noter deux. D'une part, dans le cadre par exemple d'une convention d'aménagement conclue avec la SEMOP d'aménagement, cela permettra une mutualisation des risques de l'opération et le cas échéant de ses bénéfices. Cela impliquera par ailleurs plus directement la personne publique concédante, du fait de sa présence dans les organes de direction de la société et la présidence -qui ne peut être assurée par une personne privée- du conseil d'administration ou de surveillance par un de ses représentants.

Surtout, la SEMOP d'aménagement permettra à un établissement comme Grand Paris Aménagement de coopérer au sein d'une même structure avec la collectivité locale ou l'établissement intercommunal sur le territoire desquels doit se dérouler l'opération d'aménagement ou de construction de logements. Un tel partenariat est sans nul doute préférable à un mécanisme de type Opération d'Intérêt National (OIN) où l'Etat - ou son opérateur d'aménagement - ne coopère pas vraiment avec la ou les collectivités concernées mais leur prend une bonne partie de leurs compétences d'urbanisme et ne leur laisse que peu de marge de manœuvre en termes de champ de décision.

Une nouvelle forme de SPL en gestation

Alors que les SEMOP, certes plus récentes, n'ont à ce jour pas connu un très grand succès au vu de leur faible nombre (3, dont 2 au sein d'une même collectivité), les SPLA et les SPL se sont multipliées jusqu'à atteindre le nombre respectable, selon les statistiques de la FNEPL, de 269.

Du coup, il est apparu intéressant d’étendre le champ de ces SPL en y incluant l'Etat.
C'est ainsi que le projet de loi relatif au statut de Paris et à l'aménagement métropolitain actuellement en cours de discussion devant le parlement( adopté en première lecture par le Sénat le 9 novembre et devant être présenté à l'assemblée nationale le 13 décembre) prévoit en son article 6 la création d'une Société Publique Locale d'Aménagement d'Intérêt National (SPLAIN).Composeront cette nouvelle structure l'Etat ou un de ses établissements publics d'aménagement ainsi qu'au moins une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités.
A la différence de la SEMOP d'aménagement, pas de place ici pour des opérateurs économiques privés, le capital de cette SPLAIN ne pouvant qu’être exclusivement public... condition - au-delà des critères du contrôle analogue et de des 80% d'activité - pour qu'elle puisse bénéficier du mécanisme du in-house dans ses relations avec ses membres. A noter qu'il est prévu qu'une des collectivités territoriales membres ou un des groupements de collectivités territoriales détienne au moins 35% - au-delà donc de la minorité de blocage-du capital mais aussi des droits de vote.

Elle ne devrait pas bénéficier d'un champ d'action aussi large que les SPL locales créés par la loi du 28 juin 2010 mais, se rapprochant plutôt ici des SPLA de la loi du 13 juillet 2006, ne pourra qu’organiser, réaliser ou contrôler des opérations d'aménagement relevant de la compétence d'un de ses actionnaires national ou local.

A ce stade de la discussion législative, on ne sait pas encore si seront applicables à cette SPLAIN les dispositions prévues par l'article 17 de l'ordonnance 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics sur les quasi- régie, et plus spécifiquement celles concernant le contrôle conjoint et la possibilité qu'un actionnaire puisse en représenter d'autres, mais aussi les mécanismes de filialisation et de in- house en cascade.

Il reste que, là encore, l'Etat- et plus particulièrement Grand Paris Aménagement - et les collectivités locales vont disposer, un fois le texte de loi adopté et sous réserve des modifications susceptibles de lui être apportées, d'un outil de partenariat leur permettant de mener conjointement des opérations d'aménagement sur le territoire du Grand Paris; un tel partenariat pouvant sans nul doute être dupliqué a d'autres projets et d'autres collectivités situés hors ce territoire. Et contrairement à la SEMOP d'aménagement, la SPLAIN ne sera pas constituée pour une durée limitée à la réalisation de son objet et donc d'une seule et unique opération d'aménagement. Elle pourra ainsi prendre en charge plusieurs opérations nécessitant une mobilisation pérenne et conjointe des structures nationales et territoriales sur des projets d'une ampleur et d'une complexité dépassant le cadre local.

Et cette SPLAIN ne devrait pas remettre en cause les SPLA et SPL existantes et situées sur le même territoire, dès lors qu'elles pourront être amenées à intervenir pour le compte de la structure d'intérêt national, cette dernière assurant dans ce cas le pilotage et la coordination des opérations.

La boîte à outil des PPP, tant contractuels qu’institutionnels, ne cesse donc de s'enrichir avec le temps; ce qui enrichit par la même le champ des pouvoirs adjudicateurs et donc, mécaniquement, celui de la commande publique, ce qui est une bonne nouvelle pour les entreprises.

Gageons que l'imagination de ses créateurs ne s’arrêtera pas là, ce qui ne pourra qu'être également bénéfique pour la réalisation des projets d'intérêt général tant nationaux que locaux, alors que les besoins de construction de logements neufs se font de plus en plus pressants.

Jean-Marc PEYRICAL
Cabinet PEYRICAL & SABATTIER Associés
Président de l’APASP (Association pour l’Achat dans les Services Publics)

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